En 2008, le Conseil canadien pour la coopération internationale et ses membres adoptaient un programme en 10 points visant à s’attaquer aux causes profondes de la pauvreté et de l’injustice dans le monde. Ce programme présentait une vision de la société civile canadienne quant à la façon dont le Canada peut jouer un rôle décisif pour aider à mettre un terme à la pauvreté et à l’injustice.
Trois ans plus tard ce plan d’action demeure, plus que jamais, d’actualité. Au début d’une année qui s’annonce pleine de défis pour les organisations internationales et nationales impliquées dans le développement international, je vous en présente les grandes lignes, comme un appel renouvelé à serrer les rangs et à redoubler d’ardeur pour que les priorités de ce plan deviennent réalité.
6) Promouvoir la paix
Les violations des droits de la personne, toujours présentes en temps de guerre, ont atteint ces dernières années des sommets sans précédent. Le ciblage de civils, les déplacements forcés des populations, les violences sexuelles et sexospécifiques (y compris le viol en tant qu’arme de guerre), l’engagement forcé des enfants soldats, les exécutions sommaires et les disparitions sont chose courante.
On estime également que le nombre de morts indirectes pour cause de maladie, de malnutrition, d’eau non potable et d’absence de soins médicaux est de dix fois supérieur à celui des morts liées au combat.
Le Canada doit s’engager beaucoup plus fermement en faveur du maintien de la paix. Il faut accorder la priorité aux droits fondamentaux des civils touchés par la guerre, et instaurer des mesures particulières pour protéger les droits des jeunes et des femmes.
Il faut également mettre un terme à l’impunité dont jouissent les personnes impliquées dans des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité, des génocides et d’autres violations du droit humanitaire international, et supporter l’adoption d’un traité relatif au commerce des armes.
7) Promouvoir la justice environnementale dans le monde
C’est en Australie, aux États-Unis et au Canada que les émissions de gaz à effet de serre par habitant sont les plus élevées – deux fois plus que celles de l’Union européenne (UE), six fois plus que celles de la Chine et treize fois plus que celles de l’Inde.
Le laxisme du Canada en matière de lutte aux changements climatiques et le retrait récent du protocole de Kyoto laissent craindre le pire pour les années à venir, particulièrement pour les populations les plus vulnérables.
Le mouvement mondial en faveur de la justice environnementale soutient que les pays industrialisés ont une dette particulière envers les populations du Sud, dont la valeur équivaut à des décennies de pillage des ressources, de dommages à l’environnement, de destruction de la biodiversité, de rejet de déchets et de changements climatiques. Les pays pauvres sont les plus touchés par la dégradation et l’effondrement de l’environnement car ils dépendent directement de celui-ci pour leurs aliments, leur eau, leurs matériaux de construction et leurs combustibles.
Nous devons continuer à plaider pour une plus grande justice dans la répartition du fardeau des changements climatiques et pour des pratiques d’investissement et de commerce avec les pays en développement qui passent le test de la viabilité écologique.
8) Appuyer la gouvernance démocratique et la citoyenneté mondiale
Les organisations de la société civile canadiennes (OSC), de concert avec leurs homologues du Sud, sont reconnues comme des acteurs essentiels pour un développement efficace. Pourtant, l’espace et le rôle des OSC partout dans le monde tendent à régresser, avec un mouvement accru vers la concentration du pouvoir entre les mains des gouvernements.
Le Canada doit renforcer ses propres formules de participation de la société civile à la prise de décisions et à l’élaboration des politiques. Du même coup, il doit s’engager à conférer un plus grand rôle au Parlement, à ses députés et à ses comités pour définir la politique internationale, faire progresser les droits de la personne et mettre un terme à la pauvreté mondiale.
Notre politique en matière d’aide et de développement doit reconnaître le rôle décisif des OSC, du Nord et du Sud, dans le développement démocratique, la défense des droits de la personne, la prestation efficace de l’aide et l’élimination de la pauvreté.
9) Instaurer un système multilatéral démocratique et efficace
Des problèmes à portée mondiale tels que les changements climatiques et la pauvreté endémique nécessitent une prise de décisions mondiale efficace. Toutefois, le système multilatéral a mal vieilli et n’a pas su s’adapter aux problèmes du monde émergent. Or, les institutions multilatérales reflètent les relations de pouvoir à l’échelle internationale. Les gouvernements du Sud exercent moins d’influence que leurs homologues du Nord, peu importe la tribune.
Le CCCI et de nombreux gouvernements et OSC du Sud demandent à la fois un soutien urgent pour sauver les actions multilatérales et une réforme en profondeur des institutions multilatérales pour régler les déséquilibres de pouvoir qui nuisent à leur efficacité et à leur crédibilité.
10) Optimiser et accroître l’aide
La pauvreté revêt de nombreux visages et a de nombreuses causes. Cela dit, la qualité de l’aide devient un facteur aussi important que sa quantité pour éliminer la pauvreté. Il faut porter attention aux deux dimensions.
Le budget fédéral 2012-2013 marquera la deuxième année d’une période de plafonnement de l’enveloppe d’aide internationale canadienne à cinq milliards de dollars, période qui devrait durer quatre ans. Avec ce plafonnement, l’APD se chiffrera à environ 5,44 milliards de dollars en 2012-2013, soit 0,30 % du revenu national brut (RNB) canadien, une diminution par rapport à 2010-2011 (0,37 %). D’ici 2014, on s’attend à ce que le ratio soit de 0,28 %, l’un des plus bas parmi les 22 donateurs officiels.
L’aide ne réglera pas à elle seule le problème de la pauvreté mondiale; la réforme des institutions multilatérales, les règles commerciales et les manœuvres en matière d’environnement durable ont toutes un rôle à jouer. Toutefois, si le Canada veut faire sa part pour atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement de l’ONU, il doit porter attention tant à la quantité qu’à la qualité de son aide.
(* ce texte s’inspire largement du document « Le défi mondial d’éliminer la pauvreté et l’injustice : un programme canadien en 10 points ». La 1ère partie du texte a été publiée le 21 décembre 2011)
Chantal Havard est agente de communication et de relations avec le gouvernement au CCCI.
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