Le forum annuel du Conseil canadien pour la Coopération
internationale porte cette année sur le thème du développement et de la transformation sociale, une responsabilité
partagée. Cette première journée interpelle toutes les organisations de la
société civile, car elle aborde leur avenir. Les défis auxquels font face les
organisations sont grands dans cet environnement en évolution.
Le point de départ de cette réflexion débute avec
l’essai de Michael Edwards, chercheur principal distingué à Demos et rédacteur
en chef de Transformation@openDemocracy. Celui-ci s’intitule « Réflexion
axée sur l’avenir : quatre questions qui interpellent les ONG ». Les
participants ont pris part en matinée à un exercice de visualisation où ceux-ci
étaient invités à imaginer le monde dans lequel ils voudraient vivre dans le
futur. Michael Edwards conçoit les relations mondiales en termes local-global
et non nord-sud.
Pour Anabel Cruz, directrice fondatrice de
l’Instituto de Comunicación y Desarrollo en Uruguay, le concept d’aide
étrangère n’est pas le terme à utiliser, car il implique une idée de
supériorité. Selon elle, les organisations non gouvernementales (ONG) devraient
plutôt promouvoir la coopération horizontale, par exemple entre les différents
pays d’Amérique latine. La situation politique de cette zone a beaucoup évolué
depuis une trentaine d’années. Désormais, plusieurs gouvernements sont de
tendance progressiste. Cette coopération devient donc possible et souhaitable. Elle
réduirait ainsi leur dépendance envers l’influence des puissances occidentales.
Nous devons nous interroger sur les capacités qui ont été développées par le
passé et construire à partir de ces bases.
La transformation de l’aide étrangère depuis
vingt-cinq ans et plus récemment avec la réorientation des priorités de ses
bailleurs de fonds publics oblige les organisations à repenser leur structure,
leurs pratiques et leur ancrage au sein de la société civile canadienne. Pour
certaines, cela signifie qu’elles doivent trouver de nouvelles sources de
financement pour continuer leurs activités nationales ou internationales. La
transparence de leur financement devient donc un élément essentiel du lien de
confiance qui les unit à la société civile. Comme l’indique Anabel Cruz, les
organisations doivent accepter les politiques gouvernementales pour survivre. Le
financement public de la responsabilité sociale des entreprises, notamment des
compagnies minières, semble être à la mode. Par conséquent, l’impact des
décisions gouvernementales est très important sur le mandat des organisations. De
plus, le financement public oblige maintenant les organisations à obtenir des
résultats plus rapidement. L’âge d’or du développement international est
révolu.
L’explosion du nombre d’organisations non gouvernementales
indique également que les barrières à l’entrée sont très faibles. Barbara
Levine, professeure adjointe à l’École de politique publique et
d’administration de l’Université Carleton pose la question du besoin
d’alliances stratégiques. D’après elle, ces alliances ne doivent pas être
forcées, mais plutôt créées dans une perspective de vision commune de l’avenir.
La pertinence de ces organisations est également mise
en doute. Anabel Cruz indique qu’il est important de revitaliser les liens des
ONG avec les réalités locales. La plupart d’entre elles sont déconnectées des
mouvements qui transforment la société (exemple : la place Syntagma ou le
mouvement étudiant chilien).
La définition de client est également examinée.
Selon Brian Emmett, économiste en chef à Imagine Canada, la dichotomie des
donateurs et des États / organisations récipiendaires place les organisations
dans une position difficilement soutenable. Les donateurs ne souhaitent plus traiter
par un intermédiaire et souhaitent que leur contribution ait des résultats
concrets à court terme. De l’autre côté, les récipiendaires ne souhaitent plus
être passifs dans l’attente d’une solution deus
ex machina. Il existe plusieurs exemples de partenariats avec des organismes
locaux qui sont impliqués dans l’élaboration de solutions (exemple : venir
au Canada pour travailler de concert avec l’ONG) et qui visent à les rendre
autonomes.
En conclusion, dans un contexte de changement
structurel et de crise économique mondiale, la transformation semble
inévitable. De nouveaux modèles d’aide internationale, humanitaire ou d’aide au
développement doivent être développés. Il semble pour l’instant y avoir plus de
questions que de réponses. Cependant, les organismes se devront d’être
proactifs s’ils désirent conserver leur influence, mais surtout s’ils désirent
renouer avec leurs racines. Les ONG doivent se réinventer et elles devront en
payer le prix, au risque de perdre leur identité.
Emilie Carrier
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